Friday, July 22, 2005


DECLARATION DE DOUMBIA MAJOR
Face à la situation de blocage qui s'annonce en Côte d'Ivoire

Face à la situation sociopolitique complexe et préoccupante de la Côte d'ivoire, j'ai tenu à faire cette communication non partisane pour éclairer nos concitoyens et faire des propositions dans le sens de la paix sociale au nom du conseil supérieur.
Il m'est apparu important de me prononcer sur les propos contradictoires concernant un certain "vide constitutionnel" qu'il y aurait en cas de non tenue des élections présidentielles en Cote d'ivoire au mois d'octobre.
Concernant ces rumeurs véhiculées dans certains milieux politiques par des individus qui, ne prennent pas le temps de lire la constitution, je tiens à rappeler aux uns et aux autres qu'au regard de la constitution actuelle, si le scrutin ne se déroule pas en octobre comme cela devrait se faire normalement, le président en exercice reste en fonction jusqu'à la tenue des nouvelles élections.
Il ne faut pas berner le peuple car notre rôle en tant qu'intellectuels et hommes politiques, est d'éclairer les populations et non de les maintenir dans l'obscurantisme.
J'ai été membre de la commission qui a procédée à l' écriture de cette constitution. En tant que tel, je peux me prononcer sans passion sur les 133 articles que nous avons élaborés, car ayant participé aux débats préalables à l'adoption des textes.
Avant de se prononcer sur une loi, il est bon de situer l'esprit de la loi.
Pour les constituants que nous étions, il s'agissait de mettre en place des dispositions qui puissent repondre à une situation de catastrophe naturelle ou de trouble telle que la guerre, que connaitrait le pays et qui, rendrait impossible les élections.
Dans cette situation, nous avons prévu, au nom du principe de la continuité de l'état que, le président en exercice reste en fonction jusqu'à la tenue de nouvelles élections, rendues possibles par le rétablissement de l' ordre ou de l' intégrité du territoire.
Aussi, je peux affirmer avec certitude qu'il n'y a pas un problème de vide constitutionnel en cas de non tenue des élections pour une raison ou une autre.
Bien au contraire nous y avons pensé en le résolvant à travers les articles 38 ,39 et 40 de la constitution.
D'où vient l'idée alors du vide constitutionnel?
On parle de vide constitutionnel quand on se retrouve face à une situation que la constitution ne prévoit pas.
Dans le cas qui est le notre, nous nous retrouvons face à une situation qui rend impossible le déroulement des élections.
Cette situation, c'est l' état de guerre et l'atteinte à l'intégrité du territoire.
par ailleurs, il faut savoir qu'il ne peut y avoir d'élections que dans des circonstances d'une intégrité du territoire.
Dans le cas contraire la constitution prévoit l' organisation des élections à des dates ultérieures , dans des conditions qu'elle précise.
Ainsi, si le pays se retouve divisé du fait d'une catastrophe naturelle, ou en cas d'atteinte à l'intégrité territoriale du fait d'une guerre ou d'une insurrection, les élections ne peuvent être organisées.
Dans ce cas la constitution prévoit que le président reste en fonction jusqu'à la normalisation de la situation.
Au regard de la constitution actuelle, la seule situation qui peut entraîner la vacance de la république est celle de la mort ou de l'empêchement simultanée du Président de la République, du Président de l'assemblée nationale et du vice président de l'assemblée nationale.
Hors il est invraisemblable que ces trois personnalités perdent la vie le même jour.
s'il n' y a pas d'élections en octobre, le président perdra sa légitimité mais il reste un président légal (du fait de la loi).
Cette légitimité qu'il perd est liée au fait qu'il est président du fait des textes et qu'il n' a pas une onction populaire et une légitimité qui provient des urnes, étant entendu qu'il est au terme de son mandat normal.
Il est bon que tous les acteurs politiques puissent prendre en compte cette réalité afin de revoir leurs stratégies.
Il ne sert à rien de fonder des faux espoirs et une stratégie de prise de pouvoir sur un hypothétique vide constitutionnel.
A moins d'inventer d'autres textes ou de refuser de reconnaître la constitution du pays, il sera difficile de prouver le contraire au regard des textes constitutionnels du 23 juillet 2000, devant une assemblée sérieuse.
Dans cette situation quel est la marge de manoeuvre qui reste aux différentes parties?
1-La marge de manoeuvre de la France: la France dans cette guerre se bat pour protéger ces intérêts contre une classe politique gauchiste qui remet en cause les accords traditionnels qui la lie à la Côte d'ivoire.
Elle a tout intérêt à faire partir le président Gbagbo pour mettre au pouvoir un groupe de politiciens qui protègent ses intérêts.
Tous les africains savent que la France vit grâce à ses colonies et territoires dit d'outre-mer.
Une émancipation d'une d'entre elle est dangereuse pour l'économie interne de la France. La Côte d'ivoire étant un pion essentiel du dispositif de colonisation de la France elle n'acceptera jamais, qu'une classe politique remette en cause ses intérêts dans ce pays.
D'ou la présence coûteuse de la France dans le conflit en Côte d'ivoire.
Etant donné que nous sommes en l' an 2005 et qu'après les affaires Lumumba, le Rwanda et autres, il est difficile d'éliminer physiquement un président, la France s'appuiera sur le conseil de sécurité de l'ONU pour créer des conditions d'une élection transparente pour faire partir le président Gbagbo, en douceur du pouvoir.
Elle imposera alors un groupe de personnes qui défendent ses intérêts au détriment de ceux du peuple de Côte d'ivoire dont elle n' a rien à cirer.
Quelle est la marge de manoeuvre de l'opposition : si l'opposition va aux élections dans les conditions actuelles elle est assurée de les perdre.
Du cotés du RDR les militants en zone rebelle, tétanisées par les abus de la rébellion, pour certains, se disent aujourd'hui qu'ils ne souhaitent pas donner le pouvoir d'état à ceux qui, n'ayant qu'une moitié du pays, leur ont faire vivre l'enfer sur terre (les morts que la rebellion a causé au nord sont cinq fois plus que les jeunes tués en s'opposant à Gbagbo). Dans ces conditions beaucoup d'entre eux à défaut de voter Gbagbo vont s'abstenir.
En plus la base de ce parti sans le dire, n'accepte pas l'union avec celui qui, pour eux, est supposé à la base du malheur des Dioulas, des étrangers et des métisses. Sachons que les militants ne sont pas amnésiques et que pour eux Bédié est le père de l'ivoirité source de tous leurs malheurs et leur dépréciation sociale. Il faut du temps au RDR pour expliquer les choses à sa base et se dédouaner carrément de la rébellion. Car les mains sales de la rébellion font qu'elle n'est plus fréquentable. Quiconque revendique ses accointances avec la rebellion actuelle se discrédite gravement.
Du statut de héros les rebelles sont vécus aujourd'hui en bourreaux.
Sans mobilisation de sa base, celle ci ne suivra pas le RDR dans ces choix et, seule ADO sur le terrain peut procéder à cette re-mobilisation.
Il a donc besoin de temps pour entrer au pays et prendre les choses en main.
Le PDCI lui se retrouve face à des convulsions internes qui risquent de le fragiliser.
le président Bédié jouant sa dernière carte politique ( son age avancé et il ne résistera pas à une crise interne après les élections s'il ne gagne pas ).
Vu qu'il n' y aura pas de vide constitutionnel et que la non tenue des élections profitera au président en exercice, il reste à l'opposition quatre possibilités:
Soit, elle décide de ne plus reconnaître la constitution, créant de ce fait un vide par absence de constitution (Les accords de Marcoussis n'ayant pas suspendu la constitution, le principe de cohérence fait que l'opposition ne peut pas remettre en cause cette constitution: cela paraîtra comme de la mauvaise foi).
Soit elle crée le vide constitutionnel en éliminant les trois acteurs qui empêchent le vide (ce n'est pas là une invitation au meurtre et je crois que ces trois acteurs sont vigilants).
Soit, elle va aux élections perdues d'avance et s'autoproclame vainqueur (ce qui sera difficile sans candidat unique et il faut être militairement prêt pour gérer la chienlit).
Soit enfin, elle prépare de vraies élections en acceptant de participer à une transition qui va préparer les élections crédibles.
L'opposition pourra alors compter sur la France qui ne veut plus de Gbagbo, pour faire pression au niveau du conseil de sécurité de l'ONU pour créer les conditions d'une élection qui vont entraîner le départ en douceur de ce dernier.
Car, un départ de Gbagbo par la force entraînera le saccage de tous les investissements et intérêts de la France en Côte d'ivoire.
Considérant cet état de fait et vu la situation de division du pays et le nom respect par les parties opposées des engagements qu'ils prennent, l'on peut affirmer que le pays va inexorablement vers une situation de blocage.
vu le calendrier du désarmement que, d'ailleurs rien ne garanti, on peut s'attendre à ce que les élections n' aient pas lieu sur toute l'étendue du territoire le 30 octobre.
Nous doutons fort que certaines personnes puissent accepter de désarmer , surtout après les pillages des ressources de la république et les crimes post-amnistie causés par eux. Ils trouveront toujours des prétextes pour ne pas désarmer car il y va de leur survie physique, politique et économique.

Même si par extraordinaire le désarmement se faisait le 22 octobre, combien de temps prendrait l'administration pour se déployer sur toute l'étendue du territoire?
Pensons nous qu'on peut organiser une élection crédible en 8 jours?
Nous savons tous que les élections ne peuvent objectivement se tenir aux dates constitutionnelles à moins qu'elles ne se fassent que sur une partie du territoire, laissant le sort de l'autre partie des ivoiriens aux mains des tenants actuelles de la partie nord du pays.
Le problème de la Côte d'ivoire est né d'élections mal organisées sur la base d'une constitution conflictuelle, qu'il faut changer pour une paix durable .
Si nous voulons la paix et la stabilité durable, il ne sert à rien de se précipiter pour organiser des simulacres d'élections.
Prenons notre temps pour organiser de bonnes élections.
Face à une situation dans laquelle il n' y aura pas d'élections ou celle d'élections avec un président élu avec une légitimité fragilisée, nous proposons qu'il soit mis en place une nouvelle transition politique de 18 mois qui, aura pour mission de préparer et d'organiser des élections crédibles.
La transition précédente ayant été un échec il s'impose de changer de cheval de bataille.
Cette nouvelle transition doit se faire avec des ministres issues des formations politiques et de membres de la société civile.
Ces ministres doivent être des citoyens qui mettent en avant l'intérêt supérieur de la nation et qui ont un sens de la gloire et de la grandeur du pays.
il faut un véritable sursaut républicain.
Il nous faut des ministres dignes de la république, ayant un niveau scolaire minimum de Bac+5 ou une expérience professionnelle minimum de 10 ans en tant que cadre (nous basant sur les grilles de la fonction publique).
Car nous envoyons un mauvais signale à nos enfants en désignant des ministres analphabètes dans notre gouvernement.
N'ignorons pas que la grandeur et l'honneur de la nation sont entachés par la présence de ministres "figurants et béni oui oui " au sein du gouvernement de notre pays.
Le respect que l'on a pour les ressortissants d'une nation, est fonction du regard qu'on porte sur ceux qui les dirigent.
Pour finir nous appelons toutes les parties en présence à la paix car, nous n'avons pas le droit, pour nos intérêts égocentriques, de détruire ce que nous n'avons pas construit.
Notre devoir, c’est d'amener nos compatriotes à s'accepter et d'apporter notre pierre, chacun à son niveau particulier, au développement de notre pays.
Retenons qu'au soir de notre existence chacun de nous devra se poser la question de savoir quel a été son apport personnel pour le rayonnement de son pays.

Une vie dans laquelle on donne moins à l'humanité qu'on en a reçu d'elle est un échec.
Soyons forts et travaillons tous à la paix, car en temps de conflit les hommes forts sont ceux qui construisent la paix.
Chers compatriotes il faut trouver en nous les ressources pour aller à la paix pour le bien de nos enfants et petits enfants.
Evitons les conflits interethniques et réapprenons à vivre ensemble.
Sachons que ce n'est pas les forces étrangères qui nous apporterons la paix car certaines d'elles sont dans notre pays pour la protection de leurs intérêts et non par humanisme.
Que ceux qui se réclament hommes politiques sachent qu'on fait la politique pour le bien des populations et non pour les pousser à s’entretuer.
Nous sommes face à notre destin et nous devons faire le choix entre la paix ou le chaos. Faisons le bon choix.

Doumbia Major
Président du Bureau International du CSIE
Contact:
conseilsup@yahoo.fr Tel : 0033618948545